C’était l’un des engagements forts du premier quinquennat d’Emmanuel Macron : le 100% Santé ! Son ambition ? Une meilleure prise en charge de soins autrefois très coûteux afin que de nombreux Français n’aient plus rien à débourser. Mais derrière cette mesure prometteuse – et encore mal connue – se cache en réalité un mécanisme pas si avantageux que ça. La MCRN vous aide à mieux comprendre ce que recouvre vraiment le 100% Santé, et ce qu’il implique pour vous.

 

100% Santé : de quoi s’agit-il ? 

“Des soins pour tous, 100 % pris en charge” : telle était la promesse du Gouvernement et de sa mesure mise en place en 2021. L’objectif ? Permettre aux Français de réduire leurs dépenses de santé en se faisant rembourser plus largement des soins indispensables qui, jusque-là, restaient en partie à leur charge.

Dans le viseur de cette réforme, les domaines de l’optique, de la santé dentaire et de l’audition, où le reste à charge (c’est-à-dire la somme non prise en charge par l’Assurance Maladie et qu’il vous reste à payer) est généralement élevé. Ainsi, les montures de lunettes, les prothèses dentaires ou les appareils auditifs, dont le prix, malgré le remboursement, pouvait se révéler très élevé (jusqu’à 1500 € en moyenne pour une paire d’audioprothèses), ne vous coûtent aujourd’hui… Plus rien. Plus que “des soins pour tous”, il s’agit donc avant tout d’une réduction du reste à charge : on parle aussi d’objectif “Reste à charge 0”. 

Et le gouvernement voit les choses en grand, puisque le ministre de la Santé François Braun a annoncé en janvier 2023 le lancement de la seconde étape du plan 100 % Santé. Au programme cette fois-ci : étendre la prise en charge intégrale aux fauteuils roulants, aux prothèses capillaires, voire à l’orthodontie. Il faudra néanmoins attendre la publication finale du projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2024, actuellement en discussion, pour en savoir plus. 

 

Une couverture à 100 % ? Pas tout à fait… 

Sur le papier, le dispositif est donc très avantageux. Là où une étude révélait en 2018 que 30 % des Français renonçaient à se soigner pour des raisons financières, la réforme 100 % Santé devrait permettre de réduire l’inégal accès aux soins médicaux. En mars 2023, une étude de la Drees a ainsi déjà conclu qu’en moyenne, la majorité des Français avaient obtenu un meilleur niveau de remboursement depuis le lancement du 100% Santé, notamment dans le domaine dentaire et de l’auditon. 72 % des 20 % des Français les plus modestes affichaient notamment leur désir d’avoir recours au dispositif 100 % Santé pour pouvoir se soigner. Cette mesure s’inscrit donc dans un effort de la part du gouvernement dans le domaine de la santé et des dépenses qui y sont consacrées. 

Néanmoins, le nom prometteur de la réforme ne doit pas masquer la réalité. Alors que le Gouvernement garantit “des soins pour tous, 100 % remboursés”, dans les faits, le 100 % Santé concerne uniquement les Français qui bénéficient d’un contrat responsable de complémentaire santé… Ce qui exclut les 5 % de la population qui n’ont pas de mutuelle, soit 2,5 millions de personnes.  

 

100% Santé : pas de financement public 

Quand on y regarde de plus près, on se rend compte que l’objectif réel de cette mesure est davantage économique que social. Derrière le 100 % Santé se cache un montage financier bien moins réjouissant qu’on ne le croit. Son financement est en fait tout sauf public : aucun budget supplémentaire n’a été alloué à cette mesure, qui est en réalité prise en charge à 77 % par les mutuelles (source : Unocam). 

Pourquoi ce dispositif, alors ? L’objectif du Gouvernement est très simple : il s’agit de transférer les dépenses de la santé publique vers le privé… Et au bout du compte, c’est vous qui en payez le prix. 

 

Un surcoût pour les mutuelles… Et pour leurs adhérents  

En 2021, le coût du plan 100% Santé pour les mutuelles s’élevait à 2,5 milliards d’euros (source : Unocam). Une somme loin d’être anodine, et dont la charge retombe directement sur les adhérents. Car, rappelons-le, beaucoup de mutuelles, comme la MCRN, sont des organisations à but non lucratif, qui vivent uniquement des cotisations de leurs adhérents. Difficile pour elles d’éponger les dépenses de santé publique sans que cela ne se répercute sur leurs tarifs. 

Malgré les promesses du Gouvernement, qui assurait avoir “des marges de manœuvre pour mettre en place le 100 % Santé sans augmentation de coût pour les bénéficiaires”, le tarif des mutuelles a ainsi augmenté en moyenne de 23 % depuis 2019… (source : Union syndicale Solidaires) À l’heure où le 100 % Santé devrait encore étendre sa couverture, les mutuelles déplorent cette décision et ses conséquences.  

“Les mutuelles seront, comme pour la première vague du 100 % Santé, les financeuses importantes de cette prise en charge” résumait Eric CHENUT, le président de la Mutualité Française. Toute nouvelle prestation du 100 % Santé signifie donc “une augmentation des cotisations”. “C’est le modèle économique même des mutuelles” concluait-il. Dans une tribune publiée dans Les Echos en juillet 2023, les mutuelles rappelaient ainsi qu’elles n’avaient pas “d’argent magique” 

 

Vers un démantèlement de la Sécurité sociale 

Ainsi, bien qu’il semble favoriser l’accès aux soins sur le papier, dans les faits, le 100 % Santé est donc loin d’être efficace à 100 %. En impactant directement les tarifs des mutuelles, il vous permet peut-être de payer moins cher certains produits mais augmente au fond vos dépenses liées à la santé. Cette augmentation des tarifs menace davantage les plus précaires, qui ne seront plus à même de payer leurs cotisations et devront se passer de complémentaire santé ou réduire le niveau de couverture de leur contrat, pourtant indispensable aujourd’hui pour bien se soigner.  

En prévoyant d’étendre le 100 % Santé à l’orthodontie, qui représente une dépense publique importante, ou aux fauteuils roulants, qui doivent normalement être financés par l’État dans le cadre du plan financement du handicap, le Gouvernement affiche au fond son véritable objectif : transférer au maximum les charges de la santé à d’autres acteurs et privatiser la santé publique.

Ce transfert des dépenses de la santé vers le privé ne cesse d’augmenter : alors qu’il était initialement fixé à 300 millions d’euros dans le cadre du plan 100 % Santé, le Gouvernement a annoncé cet été qu’il se monterait finalement à 500 millions d’euros… sans avoir au préalable consulté les mutuelles.

Le 100 % Santé contribue donc au démantèlement de la Sécurité sociale, de plus en plus menacée par les décisions du Gouvernement. Rappelons ainsi que ce dernier vient d’annoncer en parallèle l’augmentation du coût des médicaments et des consultations chez le médecin… 

 

Comment s’engager pour une Sécurité sociale de haut niveau ? 

La MCRN a toujours défendu l’accès à des soins de qualité pour toutes et tous. Le 100 % Santé va dans ce sens et notre mutuelle soutient la démarche de réduction du reste à charge de ses adhérents.  

C’est le transfert de charge de la Sécurité sociale vers les complémentaires santé que nous dénonçons car, au bout du compte, elle entraine une augmentation des cotisations mutualistes et réduit la couverture de l’assurance maladie universelle. Nous estimons que le fonctionnement et le financement du 100% Santé vont à l’encontre des valeurs de solidarité qui doivent sous-tendre la santé publique. Et le combat de la MCRN pour une vraie politique de santé accessible pour toutes et tous ne pourra pas être mené sans vous, ses adhérents et principales victimes des conséquences négatives du 100 % Santé. 

Les délégués de la mutuelle solidaire MCRN s’engagent, sur le terrain et dans différentes instances, pour faire entendre la voix des mutuelles à but non lucratif et défendre la Sécurité sociale. 

La lutte passe par l’engagement démocratique. Au sein de la MCRN, vous, en tant qu’adhérent, avez votre mot à dire ! Vous pouvez nous aider à porter ce combat en vous engageant directement au sein de votre mutuelle. En juin 2024, la MCRN élira ses nouveaux délégués représentants. Vous recevrez bientôt des informations dans votre boîte aux lettres.